Tous les Indiens ne sont pas hindous : diversité et minorités religieuses
Les termes « indien » et « hindou » ne sont pas synonymes. Le premier mot désigne une personne de nationalité indienne, alors que le second évoque une personne pratiquant l’hindouisme. Cette religion que les hindous nomment Sanâtana Dharma (« Éternelle loi »), est le fruit d’héritages millénaires puisés dans le védisme (religion ancienne centrée sur des textes nommés védas et qui aurait été introduite en Inde entre 1500 et 500 avant notre ère par un peuple indo-aryen, les Aryas venu d’Asie centrale) et le brahmanisme (système rituel issu du védisme, complété par des commentaires nommés brahmanas et qui s’est développé entre 600 AJC et 500 après J.C.), auxquels se sont mélangées une multitude de traditions locales, régionales et communautaires extrêmement diversifiées mais majoritairement polythéistes. Or tous les Indiens ne sont pas hindous, bien que ces derniers soient largement majoritaires. En effet, près de 80% de la population indienne (estimée à 1 milliard 200 millions d’habitants) se sont déclarés hindous lors du recensement national de 2011.
Parmi les 20 % d’Indiens non-hindous, la principale minorité religieuse est celle des musulmans qui représentent 14,3 % de la population nationale, soit plus de 170 millions d’habitants. L’Inde est ainsi le troisième pays musulman au monde, après l’Indonésie et le Pakistan. Malgré la partition, les musulmans ont donc encore un poids démographique majeur en Inde, de même qu’une forte influence culturelle, comme l’atteste, par exemple, le Taj Mahal, ce célèbre mausolée de marbre blanc fondé au xviième siècle par l’empereur moghol Shâh Jahân en l’honneur de son épouse défunte.
Cette importance démographique et culturelle de l’islam est due à sa présence ancienne dans le sous-continent indien, d’abord par le commerce avec le Moyen-Orient, puis des conquêtes militaires et politiques. Celles-ci ont surtout été le fait des empereurs moghols venus de l’ouest (dont Shâh Jahân faisait partie) qui ont dominé le sous-continent entre le xvième et le xviième siècle, en particulier dans le nord de l’Inde actuelle où la présence musulmane est encore la plus forte (plus de la moitié des musulmans indiens vivent dans les trois États septentrionaux de l’Uttar Pradesh, du Bihar et du Bengale occidental). Mais à la suite de la partition de 1947, une grande partie des élites musulmanes ont quitté l’Inde pour s’installer au Pakistan.
Aujourd’hui, les musulmans représentent moins de 15 % de la population dans la plus grande partie du pays. Seuls les États du Jammu-et-Cachemire et l’archipel des Laquedives sont à majorité musulmans (68 % de la population est musulmane dans l’État du Jammu-et-Cachemire et 96 % dans l’archipel des Laquedives). Les musulmans représentent entre un quart et un tiers de la population au Kérala (26,5 %), où se sont installées les plus anciennes communautés marchandes de l’Inde (au viiie siècle), et à proximité du Bangladesh (34 % en Assam et 27 % au Bengale occidental). Ils représentent 10 à 20 % de la population dans trois grands ensembles : la plaine du Gange, qui fut le cœur des empires musulmans ; le plateau du Deccan, berceau de grands sultanats ; et enfin dans les marges pakistanaises du Gujarat et du Rajasthan. L’immense majorité d’entre eux est sunnite, moins de 10 % sont chiites.
La deuxième minorité religieuse la plus importante en Inde est celle des chrétiens qui représentent 2,3% de la population, soit 28 millions d’Indiens. Le christianisme en Inde repose sur une marqueterie d’Églises, composée de catholiques, de protestants, d’orthodoxes et de nestoriens, mais plus de la moitié des chrétiens indiens sont catholiques. La présence du christianisme dans le sous-continent est plus ancienne encore que celle de l’islam. L’apôtre Saint-Thomas serait venu en Inde du sud (notamment au Kérala actuel) en 52 après-J.C. et aurait connu le martyre non loin de l’actuelle ville de Chennai (l’ancienne Madras, dans l’État du Tamil Nadu), où son tombeau est conservé dans une basilique. La communauté des chrétiens syriens (c’est-à-dire de rite syriaque), surtout présente dans l’État du Kérala, est particulièrement attachée à sa filiation avec Saint-Thomas qui atteste de son appartenance à la chrétienté dès les premiers siècles de l’ère chrétienne, bien avant l’arrivée des missionnaires occidentaux (d’abord portugais) à la fin du xvème siècle. Les autres communautés chrétiennes indiennes se sont en revanche constituées à partir de l’activité de différents groupes de missionnaires, principalement dans le cadre colonial portugais puis britannique. Le catholicisme romain précéda ainsi les différentes Églises protestantes qui se sont implantées à partir du xviiième siècle.
Comme les musulmans, les chrétiens indiens sont inégalement répartis sur le territoire national. Plus de la moitié d’entre eux vivent au sud d’une ligne allant de Chennai à Goa. Le Kérala et le Tamil Nadu, en particulier, comptent respectivement plus de 6 millions et plus de 4 millions de chrétiens (soit 18 % et 6 % de la population de ces États), mais les plus fortes proportions se trouvent à Goa (25 %), ancien territoire portugais, et surtout dans le nord-est (Mizoram, Nagaland notamment), où les chrétiens représentent plus de 87% de la population. S’ils sont très minoritaires dans la plupart des autres régions, les chrétiens jouent en revanche un rôle important dans les domaines de l’éducation et de la santé, comme en témoigne par exemple l’œuvre de Mère Theresa (1910 – 1997) à Calcutta.
Troisième minorité religieuse de l’Inde, les 21 millions de sikhs (« celui qui apprend », et par extension « disciple ») vivent sur un espace plus circonscrit. Les trois quarts d’entre eux habitent en effet dans l’État très dynamique du Pendjab où ils sont majoritaires (57% de la population). Le sikhisme a été fondé à la fin du xve siècle par un hindou de caste commerçante nommé Guru Nanak (1469-1539). Cette religion est souvent présentée comme un syncrétisme né de la rencontre de l’hindouisme et de l’islam : d’un côté, le sikhisme est une religion monothéiste reposant sur un livre sacré (l’Adi Granth), comme l’islam ; d’un autre, il reconnaît la loi du karma (loi des « actions » bonnes ou mauvaises qui détermine les incarnations successives) et la transmigration des âmes (samsâra), comme dans l’hindouisme.
Contrairement à ce que leur faible poids démographique (1,7% de la population nationale) pourrait laisser penser, les sikhs ont une importance politique, culturelle et économique notable en Inde. Ils sont également surreprésentés dans l’armée, en raison du statut de « race martiale » que leur avaient attribué les Britanniques. Si des visées séparatistes ont placé leur communauté au cœur d’affrontements sanglants dans les années 1980, les sikhs ont désormais pleinement rejoint le giron de l’Union indienne, à l’image de Manmohan Singh qui fut Premier ministre de 2004 à 2014.
Les autres minorités religieuses représentent chacune moins de 1% de la population mais elles n’en sont pas pour autant négligeables. C’est notamment le cas des bouddhistes (0,7% de la population) dont la religion, née entre le Népal et le nord de l’Inde, reste un élément culturel important de l’Union indienne comme en témoigne la roue du dharma bouddhiste (roue de la loi éternelle et universelle) qui figure au centre du drapeau national. En schématisant, on peut identifier trois types de bouddhistes en Inde : les habitants des zones himalayennes (Ladakh et Sikkim), les réfugiés tibétains, et les anciens hindous de castes défavorisées qui se sont convertis pour échapper aux discriminations du système des castes. Les jaïns, dont la religion serait apparue entre le xe et ixe siècle avant l’ère chrétienne, comptent désormais près de 4,5 millions de fidèles en Inde (0,3 % de la population) vivant principalement au Maharashtra, au Rajasthan, au Gujarat et au Madhya Pradesh. Ils reconnaissent plusieurs divinités, dont Mahavira (le « Grand héro »), mais aucun dieu suprême. Comme le bouddhisme, le jaïnisme rejette l’autorité des Védas hindous, mais il reconnaît la transmigration des âmes et l’importance de la non-violence (ahimsa).
Toujours lors du recensement de 2011, 7,9 millions d’Indiens (0,66 % de la population) ont déclaré appartenir à d’« autres religions ». Cette catégorie intègre les parsis, pratiquants du zoroastrisme qui vivent principalement au Gujarat et qui jouent un rôle notable dans l’économie indienne, les juifs, qui représentent quelques milliers de personnes surtout présentes à Mumbai et Kolkata, ainsi que les adeptes du bahaïsme (religion abrahamique et monothéiste fondée en Iran au xixème siècle), et ceux de la religion tibétaine pré-bouddhiste bön. Pour autant, cette catégorie des « autres religions » inclut surtout les religions dites « tribales », pratiquées par plus de 6 millions d’aborigènes (adivasi) souvent défavorisés et animistes, et vivant majoritairement dans les États du centre-est (Odisha, Jharkhand, Chhattisgarh).
Le sécularisme indien ou l’égalité des droits entre toutes les communautés religieuses
La gestion indienne de la diversité religieuse repose sur le principe du sécularisme qui a été introduit dans la Constitution en 1976. Le sécularisme indien se fonde sur la reconnaissance officielle de toutes les communautés religieuses, qui jouissent des mêmes droits et de l’égale bienveillance de l’État. L’État indien garantit ainsi à chacun les libertés de conscience et de culte qui ont également été inscrites dans la Constitution. L’article 15 interdit par exemple toute discrimination sur la base de l’appartenance religieuse, notamment dans le recrutement dans la fonction publique (article 16) ou à l’entrée dans une école publique ou subventionnée par l’État (article 29). L’article 25 reconnaît la liberté de conscience, de pratique religieuse et de propagation de la religion, et l’article 26 reconnaît à toute confession le droit de gérer ses propres institutions. La liberté d’abjurer toute religion est elle aussi garantie. De plus, la Constitution indienne n’accorde aucun droit de regard à la religion sur les lois du pays. Toutes les lois pénales sont sécularistes, à l’exception d’une partie des lois civiles traitant de la famille, du mariage et de l’héritage, qui relèvent quant à elles de la religion.
Le sécularisme indien reflète donc une conception de la nation fondée non pas sur une sécularisation de la société, mais sur la reconnaissance officielle de communautés religieuses jouissant des mêmes droits. Or ce principe est de plus en plus mis à mal par le nationalisme hindou au pouvoir depuis les élections de 2014 et de 2019.
Hindutva : l’idéologie du nationalisme hindou
Les nationalistes hindous promeuvent une conception des relations entre État et religion allant à l’encontre du modèle séculariste inscrit dans la Constitution car ils défendent l’idée d’une Inde pensée avant tout en tant que nation hindoue, et non une nation multiculturelle accordant les mêmes droits à toutes les communautés religieuses. Ce projet politique est porté par une nébuleuse d’organisations appelée le Sangh Parivar (« la Famille du Sangh »), dont fait notamment partie le puissant parti politique du Bharatiya Janata Party (ou BJP, « Parti du peuple indien »).
Le projet politique des nationalistes hindous a été élaboré et formulé à partir des années 1920 dans le contexte de la résistance nationaliste à la domination coloniale britannique. Depuis, leur idéologie se fonde sur le mot hindutva, un néologisme que l’on peut traduire par « hindouité ». Pour les idéologues fondateurs de l’hindutva (Vinayak Damodar Savarkar et Madhav Sadashiv Gowalkar), il s’agissait de permettre à « la communauté hindoue » de reconquérir une hégémonie antérieure à la domination britannique et aux missions chrétiennes, mais aussi à la domination des empires musulmans.
Les musulmans et les chrétiens sont donc particulièrement stigmatisés par l’idéologie de l’hindutva qui considère que leurs religions ne sont pas apparues en Inde, mais qu’elles ont été importées par les colonisateurs musulmans ou occidentaux, ce qui est historiquement faux puisque la christianisation et l’islamisation d’une partie des Indiens sont antérieures aux conquêtes islamiques des empereurs moghols et à la colonisation britannique. De plus, en raison du conflit qui oppose l’Inde au Pakistan depuis la partition, les musulmans indiens sont présentés par les nationalistes hindous comme des ennemis de l’intérieur, alors même que beaucoup de musulmans restés en Inde ont choisi la nationalité indienne et qu’ils tiennent à se distancer du Pakistan en servant fidèlement leur pays.
À l’inverse, les bouddhistes, les sikhs et les jaïns sont beaucoup moins ciblés par les nationalistes hindous qui les considèrent comme des « fils du sol » car leurs religions sont nées sur la terre sacrée de l’Inde, comme l’hindouisme. Mais en manipulant de vieilles craintes liées aux traumatismes de la période coloniale, les nationalistes hindous sont parvenus à générer un climat de fortes tensions sociales, en particulier vis-à-vis des musulmans et des chrétiens.
Les musulmans, premières cibles des nationalistes hindous
L’ascension politique des nationalistes hindous a été progressive tout au long du xxe siècle mais elle s’est surtout accélérée à partir des années 1990 après la démolition de la mosquée de Babur (ou Babri, premier empereur moghol) dans la ville d’Ayodhya, qui fut prise d’assaut par des fondamentalistes hindous le 6 décembre 1992 (ill. 1). Ces derniers considéraient que cette mosquée avait été construite par l’empereur musulman sur un ancien temple hindou installé sur le lieu de naissance de leur dieu-héros Râm (ou Râma), un des avatars du grand dieu hindou Vishnou. De violents affrontements ont suivi dans tout le pays et causé plus d’un millier de morts, principalement des musulmans. Cet évènement d’Ayodhya constitue à la fois un traumatisme pour les musulmans, qui ne se sentent plus dans leur pays en Inde, et un moment de bascule sur le plan des relations intercommunautaires entre hindous et musulmans. Des émeutes se sont multipliées au cours des années qui suivirent, en particulier en 2002 au Gujarat (dirigé alors par l’actuel Premier ministre indien Narendra Modi) où ont eu lieu des pogroms anti-musulmans.
La recrudescence des violences à l’encontre des musulmans s’accompagne également d’un affaiblissement de leur représentation politique, deux tendances qui s’aggravent depuis les élections générales et l’arrivée de Narendra Modi au pouvoir en 2014. En effet, depuis ces élections, « le nombre de députés musulmans à la chambre basse du parlement indien (la Lokh sabha) » n’a jamais été aussi faible et les musulmans ne représentent plus que 4 % des élus, selon Christophe Jaffrelot. Le politiste a également documenté la montée des campagnes xénophobes à l’égard des musulmans depuis 2014, en particulier celle destinée à la « protection de la vache » dans le nord du pays, qui a entraîné de nombreux lynchages d’éleveurs de bovins musulmans par des extrémistes hindous au nom de la défense de cet animal hautement sacré dans l’hindouisme.
Outre cette recrudescence de violences et d’intimidations, la première année du second mandat de Narendra Modi (2019) s’est traduite par trois mesures majeures visant directement les musulmans : la révocation de l’autonomie du Cachemire acquise depuis l’indépendance ; dans l’État de l’Assam, la déchéance de la citoyenneté indienne de près de deux millions de musulmans étant dans l’incapacité de prouver leur présence ou celle de leur famille en Inde avant la création du Bangladesh ; une loi sur la nationalité qui régularise les immigrés des pays voisins à l’exception des musulmans (Citizenship Amendment Act, 2019) et qui va donc à l’encontre de la Constitution reconnaissant les mêmes droits à toutes les communautés religieuses.
Violences anti-chrétiennes et lois anti-conversion
La principale crainte répandue par les nationalistes hindous envers la minorité chrétienne concerne la conversion des hindous au christianisme, qui, selon eux, affaiblirait le poids démographique des hindous en Inde (alors que ces derniers représentent pourtant près des quatre cinquièmes de la population). Il est vrai que de nombreux hindous de très basses castes – les Dalit (« opprimés ») que l’on a longtemps appelés « Intouchables »– se convertissent au christianisme pour sortir du système des castes et ne plus subir les discriminations dont ils font régulièrement l’objet. Mais, contrairement aux idées répandues par le BJP, la part des chrétiens parmi les Indiens est plutôt en baisse, passant de 2,6 % à 2,3 % entre 1961 et 2011. Beaucoup de Dalit se convertissent aussi au bouddhisme, mais les bouddhistes sont moins inquiétés par les nationalistes hindous que les chrétiens en raison de leur antériorité supposée sur le territoire indien.
Les violences contre les chrétiens ont surtout augmenté à partir de 1997, après la première accession d’un membre du BJP au poste de Premier ministre. Ces violences ont commencé dans le nord-est, puis elles ont explosé l’année suivante dans la grande zone tribale du centre-est où se trouvent de nombreuses missions chrétiennes (surtout dans l’État de l’actuel Odisha), mais aussi dans le sud du Bihar, ainsi qu’au Gujarat où le BJP est bien implanté. Il arrive ainsi, au nom de la lutte contre le prosélytisme chrétien, que des églises et des tombes soient vandalisées ou détruites, ou que les personnels des organisations missionnaires soient attaqués. Les intimidations prennent également la forme d’interdiction de rassemblements religieux et de confiscation de bibles et de littérature chrétienne.
Onze États de l’Inde ont même adopté des lois interdisant les conversions religieuses forcées, considérant que les missionnaires chrétiens pouvaient contraindre les hindous les plus défavorisés à se convertir, comme les Dalits et les populations tribales (aborigènes), en raison de leur faible niveau d’instruction et de leur pauvreté. Il s’agit des États de l’Odisha (en 1967), du Madhya Pradesh (1968), de l’Arunachal Pradesh (1978), du Gujarat (2003), du Chhattisgarh (2006), de l’Himachal Pradesh (2006), du Jharkhand (2017), de l’Uttarakhand (2018), de l’Uttar Pradesh (2021), du Karnataka (2022) et de l’Haryana (2022). Dans ces États, toute personne impliquée dans la conversion d’un hindou peut être poursuivie en justice et risquer jusqu'à trois ans de prison. Officiellement considérées comme protégeant la « liberté religieuse », ces lois sont destinées à prévenir les conversions opérées par la « contrainte » ou la « séduction ». Or, l’ambiguïté de ces termes peut conduire précisément à la violation du principe de liberté religieuse. Dans les États où ces lois ont été récemment adoptées, on constate en effet une augmentation de la persécution des chrétiens car elles encouragent les nationalistes hindous à s’en prendre à eux. Si ces lois ont été contestées devant les tribunaux à de nombreuses reprises, il est question qu’une loi anti-conversion soit adoptée au niveau national, ce qui rendrait la situation des chrétiens encore plus difficile dans tout le pays.
En conclusion, il convient de rappeler que l’idéologie nationaliste de l’hindutva est loin d’être partagée par tous les Indiens hindous et que l’Inde reste une démocratie sans religion officielle dont la Constitution continue de prôner le sécularisme et l’égalité de tous. Mais la conception de l’identité indienne promue par les nationalistes au pouvoir depuis 2014, basée exclusivement sur la culture hindoue, ne correspond plus à l’idée d’une nation multiculturelle et séculariste qui est à la base de la Constitution indienne, ni au régime démocratique qu’elle défend. On peut donc retenir l’expression de « démocratie ethnique » proposée par Christophe Jaffrelot pour qualifier le régime actuel en Inde, c’est-à-dire une démocratie qui « reconnaît la prépondérance de la communauté majoritaire avec laquelle la nation est appelée à se confondre, reléguant les minorités dans un statut de seconde zone ».