L’AHEU préserve et met à la disposition du public les archives des institutions de l’UE. Elle est également chargée de collecter et de préserver les archives privées d’acteurs de l’intégration et de la coopération européennes, qu’il s’agisse de personnes physiques, de mouvements ou d’organisations. Ces fonds privés apportent un éclairage nouveau aux documents déposés par les institutions européennes. Les archives ont pour mission de faciliter la recherche, de promouvoir l’intérêt du public pour l’intégration européenne et de contribuer à la transparence du fonctionnement des institutions de l’UE.
Création des archives
C’est à partir de 1977, sous la présidence de Roy Jenkins, qu’on envisage d’ouvrir les archives des différentes institutions de l’UE (alors CEE), à l’occasion du 25e anniversaire de la Communauté européenne du charbon et de l’acier. Jusqu’alors, chaque institution conserve elle-même les documents qu’elle produit, dont le volume cumulé devient très important. La décision d’ouvrir les archives communautaires au public tient également au fait qu’un certain nombre d’organisations internationales, en particulier les Nations Unies, se sont lancées dans cette démarche.
En 1983, le Conseil des Communautés européennes publie le règlement 354/83 concernant l’ouverture au public des archives communautaires. Un an plus tard, un accord est signé entre la Commission européenne et l’Institut universitaire européen (IUE), prévoyant l’installation des archives dans ses locaux de Florence.
Le choix du site fait l’objet d’intenses discussions préalables. Plusieurs options sont envisagées, notamment le siège bruxellois des institutions européennes et celui de Luxembourg. Avec le soutien du gouvernement italien, le président de l’IUE, Max Kohnstamm, ancien collaborateur de Jean Monnet à la Haute Autorité de la Communauté du charbon et de l’acier, propose au président Jenkins d’y ajouter celle de Florence. L’un des atouts de cette candidature est d’offrir un lieu unique et central pour l’accès aux archives et de donner une plus grande visibilité à la mémoire écrite des institutions européennes afin d’en faciliter l’accès au public. La convention de dépôt est signée par le haut conseil de l’IUE lors de sa séance plénière des 17 et 18 décembre 1984. L’inauguration du centre des archives a lieu le 13 décembre 1985.
Une première modification du Règlement des archives de 1983 intervient en 2003 (Règlement 2003/1700). Les amendements apportés suivent l’évolution de la politique de l’UE en matière d’accès à l’information, qui confère désormais à tout citoyen de l’Union un droit d’accès aux documents de ses institutions avant le délai de 30 ans. Ils sont également conformes aux nouvelles règles de protection des données, en particulier les données personnelles des personnes physiques, dont l’ouverture au public est encadrée. Un autre amendement majeur, créant l’obligation de dépôt légal à Florence pour toutes les institutions, organismes et agences de l’UE, est publié en 2015 (Règlement 2015/496).
Mission des archives
En vertu du règlement de 1983, chaque institution conserve la propriété des documents qu’elle produit et en arrête les modalités d’ouverture au public. Le versement à Florence s’effectue une fois par an. L’AHUE a pour mission de fournir des services d’archives historiques spécialisés et centralisés aux chercheurs et aux particuliers.
L’AHUE a également pour mission de collecter les documents de personnes privées ainsi que les archives d’autres institutions ou de personnalités ayant beaucoup contribué à l’intégration européenne. Une convention de dépôt est signée entre l’AHUE et l’institution ou l’individu concerné, le déposant conservant la propriété de ses documents.
En 2012, les archives historiques de l’UE sont transférées dans les locaux prestigieux de la villa Salviati, dont la rénovation à cet effet permet de doubler les capacités de stockage en les portant à dix kilomètres de rayonnage. La plupart des inventaires se font en français, ce qui permet d’harmoniser les procédures de traitement, de recherche, et de récupération. Les langues d’inventaire sont plus diverses pour les documents privés, notamment en fonction du souhait des déposants.
Les fonds d’archives
Les fonds de l’AHUE sont principalement constitués des archives historiques des institutions, organismes et agences européens. Quant aux fonds d’archives privées, ils se répartissent entre les legs individuels, les dépôts d’organisations européennes et d’autres collections. Il s’agit presque exclusivement de fonds d’imprimés car, à ce jour, peu de fonds numériques ont été déposés à Florence. Le passage à l’ère numérique est en cours, l’AHUE venant de mettre en œuvre un système de préservation à long terme.
Les fonds institutionnels de l’UE comprennent les archives de ses principales institutions : le Conseil, le Parlement européen et la Cour de Justice. On y trouve également les archives du Comité économique et social. Jusqu’à présent, seules deux agences de l’UE ont déposé leurs archives à Florence, le Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (DEDEFOP) et la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound). Les organisations de l’UE fondées plus récemment commenceront à le faire dans quelques années, en vertu de la règle des 30 ans.
De grands acteurs de l’intégration européenne figurent parmi les cent fonds d’archives individuelles. On trouve dans ces fonds privés les documents de plusieurs présidents de la Commission, Franco-Maria Malfatti, François-Xavier Ortoli, Jacques Delors et Romano Prodi ; ceux des présidents du Parlement européen Emilio Colombo et Enrique Baron Crespo ; ceux des commissaires Pascal Lamy, Carlo Scarascia Mugnozza et Peter Sutherland ; des fédéralistes européens Altiero Spinelli, Alexandre Marc et Pierre Uri, ainsi que ceux du Premier ministre italien Alcide De Gasperi.
Outre ces archives privées, l’AHUE reçoit les dépôts d’organisations qui, sans être des institutions de l’UE, ont l’Europe comme champ d’action et pour mission. Certains sont déposés par des organisations de jeunesse ou des mouvements pro-européens, comme le Mouvement européen et l’Union des fédéralistes européens. Un second groupe comprend les archives d’organisations scientifiques et techniques, comme l’Agence spatiale européenne, le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) et la Fondation européenne de la science (ESF).
Les collections comportent des copies d’archives fournies par les institutions ou des chercheurs. Parmi les plus importantes, on peut mentionner la collection sur l’intégration européenne, provenant des archives diplomatiques des États membres de l’UE, le fonds Walter Hallstein, fourni par les archives fédérales d’Allemagne, ainsi que les documents relatifs à Jean Monnet, qu’ils soient d’origine américaine ou qu’ils proviennent du dépôt François Duchêne.
Le catalogue de l’AHUE comprend enfin de riches collections audio-visuelles. On y trouve des documents graphiques, des cartes, 60 000 photographies, une grande quantité d’affiches et d’enregistrements audio et vidéo, ainsi qu’une collection d’un millier d’entretiens d’histoire orale.
Au cours des quarante dernières années, l’AHUE a apporté une contribution majeure à l’écriture de l’histoire de l’intégration européenne et des institutions de l’UE. En outre, ces archives ont permis de mieux faire connaître au public l’importance historique de l’intégration européenne et des institutions de l’UE. Grâce à l’instauration, en 2015, du dépôt légal obligatoire à Florence pour les institutions, organismes et agences de l’UE et au choix stratégique de numériser la consultation de ses archives, l’AHUE élargit la gamme de ses services aux usagers et aux citoyens européens.