Les femmes contribuent de façon décisive à l’ensemble des transformations économiques et sociales en Europe depuis la révolution industrielle. Cela étant, embrasser deux siècles d’activité des hommes et des femmes d’un bout à l’autre de l’Europe n’est pas chose aisée. On connaît les grandes lignes des évolutions économiques : déclin de l’agriculture au profit de l’industrie puis d’une tertiarisation des emplois dopée par le développement du commerce et des services. Ces changements se sont accompagnés de concentration urbaine et de progrès techniques et sociaux, d’une transformation des conditions de travail et, peu à peu, d’une qualification de la main-d’œuvre. Mais l’extension du salariat, le passage d’une paysannerie atomisée aux ateliers des « temps modernes » puis le développement des grands magasins et des services publics ne connaissent pas des progressions linéaires ni parallèles d’un pays à l’autre. La pauvreté et la misère n’épargnent ni les territoires ni les époques, et certains sont plus, et plus souvent, touchés que d’autres. Les chiffres manquent pour étudier précisément le recul, le maintien ou le retour de la ruralité, l’essor puis le déclin de l’industrie textile, l’apport de la métallurgie puis de l’électronique et de l’informatique, le développement des transports, des hôpitaux et des écoles. De l’ouest à l’est de l’Europe, les histoires des pays diffèrent, avec leurs accélérations et leurs retours en arrière, les choix politiques et les impacts des guerres. Malgré l’harmonisation à l’œuvre depuis plusieurs décennies, l’Europe affiche encore ses dissemblances, ancrées dans l’histoire : de la Roumanie à la Belgique, de la Suède à la Grèce, de l’Italie à l’Estonie, de l’Espagne au Luxembourg, de l’Irlande à l’Allemagne… Les comparaisons historiques rigoureuses et chiffrées manquent à l’appel.
Si certaines professions semblent au xxie siècle être, à des degrés divers, des bastions masculins d’une part, féminins d’autre part, le sexe des métiers a connu nombre de changements. Certes, on trouve peu de femmes sur les chantiers et rares sont les hommes qui s’occupent professionnellement des tâches ménagères ou de l’éducation des jeunes enfants. La montée de l’activité féminine dans le salariat a été favorisée par la tertiarisation de l’économie mais le rythme n’a pas été le même du nord au sud de l’Europe. Dans l’agriculture, dans les ateliers domestiques, toute la famille travaillait. Avec les progrès – en dents de scie – des lois et de l’éducation des garçons et des filles, la circulation des idées et la généralisation des échanges accompagnent la qualification de la main-d’œuvre, pour un meilleur partage des emplois et un rapprochement des salaires entre les hommes et les femmes, mais les crises et le chômage défont parfois durablement ici ce que les progrès techniques et l’aide financière favorisent là-bas.
La contribution des femmes à l’économie préindustrielle et industrielle au XIXe siècle
Le manque de données objectives sur le travail des femmes depuis la première révolution industrielle fait que leur contribution à l’économie des sociétés préindustrielles et industrielles européennes a été longtemps sous-estimée. Dans un contexte où prédomine la petite entreprise familiale, où la famille est l’unité de production et le chef de famille seul susceptible d’être identifié comme artisan, agriculteur ou boutiquier, le travail des femmes, des enfants et des âgés n’est ni enregistré ni décompté. Pourtant, le travail des femmes est indispensable et considérable que ce soit dans les mondes ruraux et de l’agriculture, premier secteur d’activité jusqu’à la fin du xixe siècle, ou l’industrie du coton, développée dans les campagnes britanniques à partir de la fin du xviiie siècle et jusqu’aux années 1820 dans le cadre du domestic system (dans lequel les agriculteurs effectuent à domicile le travail commandé par les manufactures), inaugurant le cycle des révolutions industrielles. Mais ce travail n’est pas rémunéré ou l’est rarement sous une forme individualisée : l’activité agricole n’est pas toujours « monnayée » et vise durablement la seule reproduction familiale ; le travail de transformation du coton est payé au volume de matière transformée (et livrée à l’artisan par le donneur d’ordres) sans tenir compte du temps passé ni des bras mobilisés. Le foyer en tant que lieu de production est placé sous l’autorité du père. Indispensable, le travail des femmes n’y compte pas, au sens où il apparaît comme un don de soi, une disponibilité à heures et corps perdus qui s’agence à l’infinie répétition des tâches quotidiennes d’entretien et de reproduction de la famille.
Quand on passe du domestic system au factory system (où les ouvriers travaillent en usine), pourtant, la mobilisation de la main-d’œuvre féminine (et enfantine) apparaît dans toute son évidence dans les enquêtes menées par les autorités britanniques, par exemple. Résistant à la transformation de leur mode de vie, les ménages ici ou ailleurs, conservent à domicile, et pour travailler « à la tâche », les épouses et les mères et détachent vers les usines les enfants et jeunes gens des deux sexes. Textile avant tout (coton, ruban, soie, tricot), la première révolution industrielle est féminine au foyer et à l’usine et parfois quasi exclusivement. Pour autant, ces nouvelles recrues ne reçoivent pas toutes un vrai salaire. On se souviendra, par exemple, que le prestige de la soie lyonnaise repose en partie sur l’industrie des « couvents soyeux » où les petites paysannes entrent vers 12 ans et s’étiolent enfermées et éduquées contre un salaire de misère directement versé à la famille et supposé alimenter leur dot.
À ce nouveau monde des ouvrières des fabriques s’ajoute le monde ancien et sur gages des domestiques. La domesticité est un secteur d’emploi considérable en Europe jusqu’à la guerre de 1914. La petite bonne ou la cuisinière n’y reçoit pas davantage de vrai salaire mais des gages contre les avantages que lui vaut le fait d’être nourrie et logée sur place. On rappellera ici l’ampleur alarmante du travail à domicile dans les villes européennes autour de 1900 (sweating system, littéralement « système de la sueur », terme qui surligne l’exploitation du travail à la pièce) alors que le mouvement d’industrialisation et d’urbanisation est largement avancé et que la concentration des effectifs ouvriers dans les usines atteint un niveau sans précédent autour des industries masculines du cycle, de la mécanique, puis de la métallurgie. Autour de la machine à coudre ou dans l’industrie essentiellement manuelle des fleurs artificielles, par exemple, l’emploi féminin à domicile non protégé et à la tâche est très élevé.
Le labeur des agricultrices
Dans les premières années du xxe siècle, aux champs comme à l’usine, hommes, femmes et enfants travaillent : en 1901, en France métropolitaine, 16 % des moins de 18 ans sont recensés comme actifs (20 % des garçons et 13 % des filles). Globalement, le taux d’activité des hommes (68 %) représente près du double de celui des femmes (35 %). Pour autant, la difficulté à délimiter ce que l’on compte et nomme comme du travail pour les femmes est un leitmotiv des recensements de ces années-là : « le classement des femmes est souvent affaire d’interprétation », « on ne dispose pas d’un critérium précis pour le classement des femmes… », lit-on dans tous les livres de recensements de la population française du début du xxe siècle.
Jusqu’aux années 1940, l’agriculture reste le principal secteur de l’économie dans la plupart des pays européens, même si son déclin est amorcé, au profit d’une industrialisation plus ou moins rapide selon les pays. De ce point de vue, la transformation est nettement plus avancée en Grande-Bretagne qu’ailleurs.
Mais il faut signaler, avec le statisticien Jean Daric, « les conceptions, fort différentes, qui président au dénombrement de la population féminine de l’agriculture ». En France, de 1906 à 1954, toutes les épouses d’agriculteur, qui ne déclarent pas une autre activité, sont comptées d’office comme chef d’établissement dans l’agriculture. C’est aussi le cas dans certains pays comme l’Allemagne et la Tchécoslovaquie, mais ce n’est pas une règle générale, loin de là. Ainsi, autour de 1930, la proportion de femmes comptées dans la population active agricole varie, selon les chiffres bruts, de 6 % en Grande-Bretagne à 50 % en Allemagne (41 % en France). Bien sûr, ces différences sont peu vraisemblables. Elles tiennent aux contours variables des définitions statistiques qui affectent les frontières entre activité et inactivité.
Le problème de la recension du travail des femmes dans l’agriculture se pose partout en Europe, au moins jusqu’au début des années 1960 : une paysanne dans un champ, travaille-t-elle ou regarde-t-elle le paysage ? Par exemple en France, un changement de définition de la population active agricole contribue à diminuer de façon significative le nombre des agricultrices – et par là même le nombre de femmes actives. L’histoire du travail au xxe siècle affirme que l’activité professionnelle des femmes aurait eu tendance à diminuer de 1901 à 1962. Mais c’est ce qu’on peut appeler une illusion d’optique statistique, due à un changement de définition de l’activité agricole. Au début du siècle, tous les adultes vivant avec un agriculteur et n’ayant pas d’autre occupation déclarée sont considérés comme étant eux-mêmes des agriculteurs. Or il s’agit essentiellement de leurs épouses. En 1954, les experts décident de ne plus compter dans l’agriculture que les personnes déclarant explicitement exercer cette profession. Ils reconsidèrent ainsi l’activité féminine à partir d’une hypothèse forte mais non explicitée : les femmes d’agriculteurs qui ne se déclarent pas agricultrices sont considérées comme inactives alors que, jusque-là, l’hypothèse inverse allait de soi. Ce changement de définition soustrait brusquement 1,2 million de personnes – dont près d’1 million de femmes – de la population active française. Pas étonnant, dans ces conditions, que l’activité des femmes semble décliner.
La population active non agricole des années 1930
Pour limiter ce biais, Jean Daric concentre dans ses comparaisons internationales son étude de la féminisation de l’emploi dans les années 1930 sur la population active non agricole, en étudiant les pays où cette distinction est possible. Il affirme alors que le taux d’activité de la population féminine en France, restreint aux professions non agricoles, « se situ[e] parmi les plus élevés du monde » (23 % hors population agricole, 34 % en comptant les agricultrices). Ce taux n’est dépassé que par celui de la Grande-Bretagne (au développement industriel plus rapide que celui de la France) et de la Suisse (27 %). Suivent la Belgique et la Suède (21 %,) l’Allemagne et le Danemark (20 %), puis la Norvège (19 %).
Vers 1930, la part des femmes dans la population active non agricole française (34 % en 1931) avoisine celle de la Suisse (37 %), de la Suède et du Danemark (35 %) et précède celle de la Norvège (33 %), la Pologne (32 %) la Grande-Bretagne (31 %) et l’Allemagne (30 %).
Part des femmes dans la population active non agricole dans les années 1930, comparaisons internationales
Dans tous les pays où il est possible de l’observer, les jeunes femmes travaillent plus souvent que celles âgées de plus de 35 ans. Les courbes d’activité par âge décroissent, souvent rapidement, autour de 25 ans : on peut supposer que, dans les années 1930, beaucoup de femmes quittent leur activité lorsqu’elles se marient (ou changent d’activité pour se consacrer à l’agriculture).
Mais la courbe d’activité des Françaises est particulière : son allure est nettement plus plate car elle est relativement plus élevée aux âges mûrs que celles des autres pays. En Tchécoslovaquie, aux Pays-Bas, en Italie, la part des femmes dans l’activité non agricole est, à tous les âges, en dessous de celle des Françaises (jusqu’à moitié moins aux âges supérieurs pour les Pays-Bas). Dans d’autres pays au contraire, la proportion de femmes au travail est plus élevée qu’en France chez les jeunes (en Suisse, Grande-Bretagne, Danemark notamment) mais décroît très rapidement avec l’âge, les taux d’activité des femmes plus âgées étant plus bas que ceux des Françaises (sauf en Suisse).
Le mariage constitue souvent un obstacle plus ou moins marqué selon les pays à l’activité féminine dans les années 1930. C’est en France que la proportion des épouses parmi celles qui sont actives (hors agriculture) est la plus élevée (39 %). Cette proportion est aussi assez forte en Belgique (37 %) et en Tchécoslovaquie (30 %) mais particulièrement basse aux Pays-Bas (9 %), en Suède (13 %), en Grande-Bretagne (15 %). L’Italie, la Suisse (19 %) et la Hongrie (18 %) occupent une position intermédiaire. Ces proportions sont bien sûr tributaires de la nuptialité du pays : l’âge au mariage varie de 24 ans en France à 27 ans en Suisse et en Suède et la part de femmes mariées est donc différente. Cependant, en France, une femme mariée sur cinq travaille dans un secteur non agricole (19 %), un peu moins en Belgique (17 %) et en Suisse (14 %), contre seulement une sur dix en Grande-Bretagne et en Tchécoslovaquie, une sur vingt en Hongrie, Italie ou aux Pays-Bas.
Ainsi, en Suisse, en Grande-Bretagne, en Suède, où la participation des femmes aux activités non agricoles est très élevée, le taux d’activité des femmes mariées est nettement inférieur à celui des Françaises.
L’avènement du salariat et la féminisation du monde du travail
La première moitié du xxe siècle est marquée par l’essor des emplois administratifs et du secteur tertiaire et la progressive féminisation de ces emplois. Par exemple en France, de 1901 à 1936, la part des emplois du commerce passe de 10 à 14 % et celle des femmes dans ces emplois de 37 à 42 %. Les services publics administratifs restent limités sur cette période (3 à 4 % des emplois) mais la proportion de femmes dans ce secteur augmente de 16 à 29 %. Entre 1936 et 1962, le recul de l’agriculture est compensé par le développement de l’industrie. Le secteur tertiaire se développe nettement à partir des années 1960 : de 1968 à 1999, il augmente en France de 45 % à 72 % des emplois et la place des femmes de 46 % à 53 %.
Autres prémices aux transformations ultérieures : l’entre-deux-guerres marque le début de l'accès des femmes aux formations et aux professions supérieures. Cet accès est tributaire des droits civils et politiques dont elles disposent. Mais ce temps long de conquêtes, d'abord individuelles et limitées à quelques pionnières, prépare la progression inéluctable et spectaculaire des scolarités féminines en Europe dans la deuxième moitié du xxe siècle.
Pendant les guerres, les femmes sont amenées à remplacer les hommes partis au front, dans certains secteurs traditionnellement dominés par les hommes, comme la métallurgie. Elles sont recrutées à des salaires bien inférieurs y compris quand elles occupent les mêmes postes, notamment en France et en Angleterre. Après le conflit, elles restent un certain temps à leurs postes, la démographie de l’époque étant alors déséquilibrée par les pertes humaines masculines. Pourtant, l’effet des guerres, souvent cité comme un des principaux moteurs de la mise au travail des femmes, apparaît bien éphémère si l’on en juge par l’examen précis des statistiques françaises. Passée la reconstruction, les conséquences s’effacent assez vite, des immigrants puis de nouvelles générations d’hommes se substituent aux femmes. La part de l’activité féminine revient alors – presque – à son niveau de départ : « Tout se passe, écrivent Patricia Bouillaguet-Bernard, Annie Gauvin-Ayel et Jean-Luc Outin, comme si cette pénétration des femmes dans l’activité productive pendant la guerre s’avérait sans conséquence par la suite et parfaitement temporaire. »
À partir des années 1960, dans la plupart des pays européens, on assiste à une lame de fond : la croissance continue et soutenue du nombre de femmes actives. Depuis cinq décennies, en Europe, le renouvellement des forces de travail s’est fait, pour l’essentiel, par la croissance de l’activité féminine. Dans les années 1960, les femmes représentent 30 % de la population active de l’Union européenne, contre 45 % au début du xxie siècle. Cette croissance est sous-tendue par deux évolutions majeures : la tertiarisation des emplois et la montée en puissance du salariat. Les taux d’activité des femmes progressent partout, mais à des rythmes différents selon les pays, comme le soulignent tableaux et courbes.
Pour les hommes, les évolutions des taux d’activité sont tout au long du siècle simples. Mises à part les périodes très particulières des guerres et d’après-guerres, ils se maintiennent à un niveau très élevé au milieu du cycle de vie. Les progrès de la scolarisation d’une part, les droits à la retraite d’autre part, retirent, au fil du xxe siècle, de plus en plus de jeunes et de seniors du marché du travail, entraînant une concentration de l’activité masculine sur les âges intermédiaires (entre 35 et 55 ans), voire sur une seule génération. Selon les pays, cette concentration est plus ou moins forte : les plus jeunes et les plus âgés atteignent des taux d’activité particulièrement bas en France dans les années 1990. C’est moins vrai en Grande-Bretagne et en Allemagne où le système éducatif débouche plus vite sur des formations en alternance ou sur une prise en charge des jeunes par les entreprises, et dans les pays du Nord où l’âge de la retraite est sensiblement plus tardif.
Au tournant du xxie siècle, la tendance s’inverse en Europe : sous l’impulsion des politiques publiques, les taux d’activité des plus jeunes et des plus âgés augmentent. Cependant, avec les crises économiques, l’emploi court ou à temps partiel et le chômage touchent massivement les jeunes en insertion professionnelle et les seniors, à des degrés divers selon les pays.
Taux d'activité des femmes dans les pays d’Europe
1970-2013 classement selon le taux d’activité des femmes en 2013
Champ : femmes 15 à 64 ans (et hommes 15 à 64 ans dans la dernière colonne)
Courbes d’activité par âge des femmes dans certains pays d’Europe, 1970-2011
Métiers d’antan, professions d’aujourd’hui : encore loin de la parité
Du déclin de l’agriculture à l’industrialisation puis à l’explosion du tertiaire, la transformation de l’économie traverse l’Europe. Pourtant, aujourd’hui comme hier, nombre de métiers et de secteurs sont très sexués. Les femmes sont toujours présentes dans l’agriculture, les services domestiques, et dans certains secteurs de l’industrie comme le textile et l’habillement, en déclin au fil de ces deux siècles. Elles sont en revanche très rares sur les chantiers, dans la métallurgie, qui restent des bastions masculins dans toute l’Europe. Certaines branches de l’électronique font appel à la main-d’œuvre féminine, parfois au prétexte de sa dextérité. Mais la progression des femmes dans les professions très qualifiées de l’informatique est étonnement lente en Europe (ce qui n’est pas le cas, semble-t-il, dans certains pays asiatiques).
Partout, les femmes occupent une place importante dans les bureaux avec l’extension du salariat et du tertiaire. Certains métiers qualifiés, autrefois réservés aux hommes, deviennent largement mixtes au début du xxie siècle, grâce à la percée des scolarités féminines : professeurs mais aussi médecins, magistrats, avocats, cadres administratifs sont de plus en plus souvent des femmes. Pourtant, en moyenne, on ne les trouve pas dans les mêmes spécialités ni aux mêmes niveaux de responsabilités que les hommes, et, à qualification égale, elles sont moins bien payées. Après les travaux domestiques, l’éducation, la santé et l’administration sont désormais les secteurs de prédilection des Européennes.