Petites patries et grande patrie dans les campagnes françaises (xixe siècle)

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Dans les sociétés rurales traditionnelles, les identités collectives étaient largement associées à l’inscription des individus dans des solidarités communales et/ou paroissiales. Progressivement, au cours du xixe siècle, l’appartenance à la nation devint un paramètre dominant dans la définition des identités sociales. L’intégration nationale avaient précipité la disparition des coutumes villageoises dont la vigueur entretenait le sens du groupe, sans provoquer la dilution du sentiment d’appartenance au village. L’institution municipale, relais essentiel de l’action de l’État dans la société paysanne, devint en effet la matrice d’une identité de terroir totalement reconfigurée. Par ailleurs, les classes dirigeantes, que la dépopulation des campagnes ne cessait d’inquiéter, s’efforcèrent de développer, chez les jeunes paysans, l’attachement à la petite patrie communale, condition de l’intégration à la nation. 

Illustration 1. Mairie-école d’Haramont (Aisne). Carte postale, circa 1910.
Illustration 1. Mairie-école d’Haramont (Aisne). Carte postale, circa 1910.
Illustration 2. Une monographie d’instituteur (1899). Archives départementales de la Meuse. Specimen de monographie communale réalisée à l’occasion de l’Exposition universelle de 1900.
Illustration 2. Une monographie d’instituteur (1899). Archives départementales de la Meuse. Specimen de monographie communale réalisée à l’occasion de l’Exposition universelle de 1900.
Illustration 3. François Lacour. Les conscrits de 1850. Estampe. Paris, Imp. Lacour.
Illustration 3. François Lacour. Les conscrits de 1850. Estampe. Paris, Imp. Lacour.
Sommaire

À l’aube du xixe siècle, pour la plupart des Français, en particulier les ruraux, le sentiment national, loin d’être inconsistant, n’était nullement prépondérant dans le paramétrage de leur identité. Celle-ci intégrait d’autres formes d’appartenance, par exemple corporatives ou territoriales. Le renforcement progressif d’une conscience nationale à l’époque contemporaine finit par modifier cet équilibre. Ouvriers et paysans se définissaient de plus en plus comme des Français, et de moins en moins par référence à leur inscription dans des solidarités plus restreintes. En quelques décennies, une véritable révolution identitaire s’était opérée. En témoigne, dans les années 1890, la multiplication des violences xénophobes (par exemple le massacre d’ouvriers italiens, à Aigues-Mortes, le 17 août 1893).

Les identités territoriales, jusqu’alors si vivaces dans la civilisation paysanne, s’étaient-elles désintégrées par l’effet de cette dilatation du sentiment identitaire ? Les grandes mutations qui avaient provoqué le décloisonnement d’une société enclavée (révolution des transports et des communications, insertion des économies agraires dans de vastes marchés, dépendance accrue à l’égard des pouvoirs centraux) avaient-elles anéanti tout sentiment d’appartenance locale ? C’est la thèse développée par l’historien Eugen Weber, dans un ouvrage classique, dont le titre français (La fin des terroirs) résume son idée. Un double mouvement d’intégration à la nation et de consolidation des droits de l’individu aurait provoqué la dissolution des solidarités locales traditionnelles. Les groupes primaires d’appartenance auraient du même coup perdu toute consistance.

Cette présentation des choses, sans être fausse, est malgré tout un peu sommaire, au moins dans la formulation proposée par Eugen Weber. Cet auteur, abondamment cité, s’est montré peu attentif aux mécanismes locaux du processus de nationalisation des identités, aux possibilités de reformulation des attaches locales à la faveur de l’intégration des communautés locales à l’État-nation, ou encore à la possibilité théorique d’une articulation entre plusieurs niveaux d’appartenance, dans une construction emboîtée.

Les identités de terroir dans la société rurale traditionnelle

Cette hypothèse d’un système d’appartenances territoriales s’organisant en cercles concentriques n’est pas une vue de l’esprit. Dans un chapitre de ses mémoires consacré au Paris des années 1830, Martin Nadaud évoquait des rivalités de paroisses, de cantons, de provinces, parmi les ouvriers-paysans employés sur les chantiers de la capitale. Mais dans cette structure gigogne des identités locales, l’échelon municipal (et/ou paroissial) était prépondérant. Les manifestations du patriotisme de clocher étaient en tout cas multiples.

Il pouvait par exemple s’exprimer lorsque l’existence même de la communauté se trouvait menacée par des tentatives de suppression administrative des petites paroisses ou des petites communes. Les populations s’y opposaient farouchement. Leur argument principal, exprimé soit à l’occasion d’enquêtes d’intérêt public, soit dans des pétitions adressées à la préfecture, pointait les différences de mœurs, de traditions, d’habitudes, entre les populations des localités que l’on envisageait de réunir. Elles auraient été, à en croire les réclamants, absolument étrangères l’une à l’autre. Une totale incompatibilité de caractère rendait impensable la perspective d’une fusion.

Les bagarres rituelles entre groupes de jeunesse (lesquels réunissaient les garçons domiciliés sur le territoire d’une même commune) exprimaient et alimentaient cette rivalité latente entre localités voisines. La défense du point d’honneur local en constituait l’enjeu et la justification. Ces violences, ancrées dans les traditions, tolérées et même encouragées par les adultes, ne déclinèrent pas avant les années 1830.

Dans la société traditionnelle, l’identité communale reposait sur tout un dispositif destiné à entretenir une image négative des habitants des localités proches. La conscience de soi était largement dépendante de ce travail de construction de l’altérité. Le sobriquet collectif (par exemple, les Ours d’Arbouans ou les cocus d’Arthenans en Franche-Comté), supposé souligner des traits de caractères locaux, de même qu’une sensibilité aiguë aux petites variations d’habitudes, de parler, de caractère, contribuaient notamment à cette production de la différence.

Cette identité-repoussoir, fondée sur la mise à distance du voisin désigné comme un étranger, peut apparaître en décalage avec la réalité des rapports sociaux dans la France paysanne du premier xixe siècle. En effet, les communes rurales ne constituaient en aucun cas des entités fermées sur elles-mêmes. La mobilité résidentielle était importante, notamment dans les catégories les moins dotées en biens fonciers ; les échanges matrimoniaux se jouaient des frontières administratives : l’endogamie communale ne constituait jamais une règle. En outre, n’importe quelle commune était traversée par des divisions internes : entre coteries, entre sous-unités géographiques ou entre le chef-lieu et les hameaux.

Toutefois, la vie sociale s’organisait partiellement dans les limites étroites de la collectivité, ce qui ne pouvait que contribuer à nourrir un sentiment d’appartenance au groupe. Entre autres, le religieux est important dans la production des identités de terroir. La paroisse, comme du reste la municipalité, déterminaient le rythme de la vie publique. Le pouvoir social de la grande propriété foncière s’exerçait en partie dans le cadre de ces deux institutions. Enfin les traditions collectives impliquaient, d’une manière ou d’une autre, l’ensemble des membres de la collectivité. Les cérémonies périodiques (celles du cycle Carnaval-Carême, de Pâques, du mois de mai…), la justice coutumière, les divertissements (fête patronale, dimanche des brandons en début de Carême, où on allume des feux) – bref, le « folklore » – avaient un caractère « municipal » très prononcé. Les fêtes votives, les grandes danses collectives étaient des manifestations tangibles de la vigueur des solidarités locales. Ajoutons que dans une société orale et du face-à-face, la communauté villageoise exerçait une forte emprise sur le quotidien des individus. La commune délimitait un espace de circulation du ragot.

Tout ce que la vie municipale comportait d’informel, de coutumier, tomba progressivement en décadence au cours du siècle (la guerre franco-prussienne paraît avoir accéléré la disparition de nombreux usages). L’alphabétisation fut sans doute un facteur décisif dans le délitement des solidarités locales traditionnelles. La lecture du journal, dès lors qu’elle cessait d’être collective, impliquait un double mouvement de repli sur la sphère privée et d’ouverture sur le monde extérieur. Dans une société plus mobile et plus ouverte, davantage au contact des cultures citadines, les antiques traditions se vidaient de leur sens. Les jeunes, à qui il revenait naguère d’entretenir ces usages, s’en détournaient, de même que la bourgeoisie de village soucieuse de se démarquer des classes populaires. Avec le dépérissement des vieilles coutumes paysannes, c’est le socle d’une identité communale traditionnelle qui se dérobait. 

L’État-nation au cœur des petites patries

Si l’intégration nationale provoqua  le démantèlement de l’ensemble des coutumes qui entretenait une conscience de groupe, il ne faut pas en conclure trop hâtivement à un relâchement des solidarités villageoises. De manière en apparence paradoxale, une présence accrue de l’État dans le monde rural, bien loin de dévitaliser les collectivités locales, contribua à leur redonner consistance. La municipalité fut un relais essentiel des institutions englobantes, lesquelles s’organisaient et agissaient à l’intérieur du périmètre de chaque commune, en mobilisant des intermédiaires (maîtres et maîtresses d’école, édiles…) bien insérés dans le microcosme local. L’intégration des villages à l’État-nation reposait – partiellement – sur une dynamique étroitement municipale. Elle fut dès lors vécue, perçue, comme un processus engageant ou impliquant une collectivité faisant corps. 

L’histoire des fêtes de souveraineté offre une première illustration de ce que Daniel Fabre qualifiait d’« engendrement local du national ». Sous le Second Empire, le succès de la Saint-Napoléon, le 15 août, fut largement tributaire de la vitalité des organismes municipaux, très impliqués aux différentes étapes de l’organisation des festivités. Après 1880, le 14 juillet revêtit dans le monde rural un caractère simultanément national et municipal. Les édiles, des militants républicains, étaient mis à contribution. On célébrait la nation, la République, mais à l’échelle et dans le cadre de la commune, pour un public constitué des habitants de la localité.

Autre exemple, l’école primaire, dont on sait le rôle dans l’approfondissement d’une conscience nationale, et qui était communale (ill. 1). Il faut d’ailleurs observer que l’organisation des activités périscolaires par les instituteurs et les institutrices contribua, comme la sociabilité associative, à dynamiser la vie municipale (ill. 2).

C’est encore dans la culture du conscrit que pouvait s’observer l’interpénétration de deux sphères d’appartenance. La conscription fut, par essence, une institution nationale (ill. 3). On a d’ailleurs pris l’habitude d’apprécier le niveau d’insertion des populations dans la communauté nationale à l’aune des variations départementales du taux d’insoumission. Par ailleurs, l’enrôlement dans l’armée aurait directement contribué à transformer les jeunes agriculteurs en citoyens français.

L’institution n’avait en principe – et à l’inverse par exemple de la garde nationale – aucun caractère municipal. En février de chaque année, les garçons de 20 ans devaient se rendre au chef-lieu de canton pour le conseil de révision, au cours duquel ils subissaient un examen d’aptitude physique et, jusqu’en 1905, participaient au tirage au sort. Mais dès le début du siècle, les jeunesses villageoises s’approprièrent ce rituel civique pour l’intégrer à la panoplie des traditions communautaires. Des quêtes étaient organisées à l’approche du conseil, dont le produit était consommé lors d’un banquet. On se rendait en cortège au chef-lieu, derrière la bannière municipale. La journée s’achevait fréquemment en batailles rangées opposant des conscrits de communes rivales. 

À partir de 1848 surtout, la politique électorale contribua évidemment au désenclavement du monde rural. Chaque scrutin, même lorsque son enjeu était en théorie local, associait le citoyen-électeur à la vie de la nation. Pourtant la « grande » politique fut largement, mais pas exclusivement, vécue sur un mode étroitement municipal. L’implication des villageois dans les luttes électorales, peu importe ses modalités, son orientation ou son intensité, n’avait souvent de sens que rapportée aux particularités de la micropolis locale dans laquelle ils étaient insérés. 

Lors des cortèges électoraux de la Seconde République ou du 8 février 1871, l’identité communale trouvait, dans le vote au chef-lieu de canton, une occasion de s’afficher au grand jour. Plusieurs rixes intercommunales éclatèrent également lors des élections d’avril 1848.

Par ailleurs, le militantisme – surtout le militantisme républicain – était totalement incrusté dans les sociabilités villageoises (celles des chambrées ou des débits de boissons) qui, dès lors, se trouvaient revigorées et métamorphosées. 

Mais, plus généralement, les paysans participèrent aux luttes politiques qui agitaient le pays en s’impliquant dans des disputes intra-municipales. À l’unanimisme électoral des communes dont les habitants se rendaient aux urnes en procession, ou accordaient tous leurs suffrages au même candidat, s’opposaient en effet des situations de division factionnelle mettant aux prises deux coteries politisées. Cette propension des communes rurales à se scinder en partis rivaux, phénomène complexe et ancien, produit des concurrences entre notables, se perpétua au xixe siècle à l’occasion des grandes crises politiques nationales. On pouvait observer une recrudescence du factionnalisme municipal dans les périodes de tension (début du règne de Louis-Philippe, Seconde République, années 1870 par exemple). Sans qu’il soit toujours aisé de comprendre comment les choses se passaient, chaque coterie municipale se dotait d’une identité politique. À la faveur d’une dispute opposant, selon les circonstances, orléanistes et légitimistes, rouges et blancs, républicains et partisans de l’Ordre moral…, la localité se trouvait insérée dans le champ politique national et vivait au rythme de ses soubresauts. Mais le conflit était surtout perçu comme une querelle de famille, une division interne au groupe, une déchirure communautaire. Il donnait lieu à des provocations réciproques en place publique, à grand renfort de chansons injurieuses, de sérénades, de charivaris, d’érections et d’arrachages d’arbres (ou « mais ») d’honneur… La politique avait peut-être favorisé la division des village, mais une conscience municipale se trouvait sans doute confortée par ces querelles internes : la commune éprouvait d’une certaine manière son existence dans la division.

Des identités emboîtées ?

La thématique des deux patries était très consensuelle au sein des élites française, au xixe siècle comme durant l’entre-deux-guerres. Pour les classes dirigeantes, la nécessaire consolidation du sentiment d’appartenance à la nation ne devait pas aller jusqu’à provoquer le relâchement des attaches locales. Chaque Français était supposé demeurer fidèle, au moins affectivement, à sa « petite patrie », définie comme le pays natal. Cette notion était par ailleurs assez plastique : elle pouvait aussi bien désigner une métropole provinciale, un petit chef-lieu, une région historique, une contrée d’envergure plus modeste ou – pour ce qui concernait les agriculteurs – un simple village. Elle désignait tout un univers aimable, harmonieux, paisible, soit l’exacte antithèse de la ville, turbulente, immorale et contestataire. Selon les idéologues de l’enracinement, l’attachement à la petite patrie, bien loin d’être incompatible avec l’amour de la France, en était la condition. Les deux patriotismes ne pouvaient que se renforcer mutuellement. Lieu commun, ce présupposé n’était jamais discuté. Et développer, parmi les jeunes ruraux, le sentiment de cette double appartenance, était une préoccupation constante des classes dirigeantes.

La crainte des effets politiques et sociaux du dépeuplement des campagnes fut sans doute en partie à l’origine de cette célébration tous azimuts des vertus du patriotisme de clocher. Les classes dominantes étaient littéralement hantées par l’image des jeunes villageois happés par la ville et ses séductions trompeuses. À tort ou à raison, le monde rural était associé au respect des traditions, de l’autorité, de la morale religieuse… Les paysans, en « désertant » leur village natal, échappaient, croyait-on, à toute espèce de contrôle social. De là une sourde inquiétude, en particulier chez les grands propriétaires terriens qui avaient tout intérêt au maintien d’une main d’œuvre agricole pléthorique. Le clergé catholique, de son côté, redoutait de voir les pieux paysans s’égarer parmi les mécréants.

Mais les fondateurs de la République se firent à leur tour les ardents défenseurs du culte des petites patries villageoises, sous l’impulsion notamment de Gambetta. La commune rurale, que Jules Ferry associait, sous l’Empire, à la pression électorale et à la manipulation des votes, fut désignée après 1870 comme le lieu par excellence de l’apprentissage de la démocratie et de l’éclosion du sentiment national. Chaque municipalité était une République en miniature,  chaque commune une France en réduction. C’est en se familiarisant avec le fonctionnement de la démocratie municipale, en participant à l'élection des conseillers, et indirectement, à la désignation du maire, que les ruraux, naguère dénigrés pour leur fanatisme napoléonien, pourraient devenir des citoyens à part entière. En outre, en apprenant à aimer leur village, ils se prépareraient à adorer la France. 

Les laudateurs du patriotisme local mobilisaient différents outils de communication (par exemple la littérature ou les expositions universelles) et s’exprimaient depuis différents lieux au sein de l’espace public. Cette idéologie de l’enracinement trouva, dans le monde rural, des adeptes et des apôtres. Certains étaient issus de la bourgeoisie des professions libérales, mais la plupart étaient instituteurs ou membres du clergé paroissial. Ces petits notables étaient fortement encouragés par leur hiérarchie à propager l’amour du sol natal, mais ils n’avaient pas besoin de cette impulsion venue d’en haut pour s’atteler à la tâche. La trajectoire de vie comme les conditions d’existence des curés et des maîtres d’école peuvent expliquer leur enthousiasme à s’approprier ce discours, et à le communiquer autour d’eux au moyen d’écrits consacrés à l’histoire et à l’archéologie des villages. Ces hommes avaient de l’instruction et des loisirs. Issus pour la plupart de la paysannerie mais devenus des êtres un peu à part au milieu des agriculteurs, ils exprimaient la nostalgie de leurs origines paysannes dans la célébration d’une civilisation villageoise idéalisée. La publication, pour un public local, de monographies communales, leur offrait par ailleurs la possibilité de communiquer avec les paysans qu’ils ne pouvaient fréquenter dans le cadre de la sociabilité ordinaire. Et, pour ces petits notables aux maigres revenus mais très soucieux de leur image publique, la production d’un savoir à usage local était une ressource précieuse. 

Dans leurs écrits (il pouvait s’agir d’épaisses monographies, de minces brochures, de notes manuscrites, d’articles publiés dans un bulletin municipal ou paroissial) comme dans leur enseignement oral (cours pour adultes, conférences, leçons d’histoire), ces érudits stigmatisaient les candidats à l’exode. Ils mettaient en garde contre les dangers de la ville en faisant l’apologie de l’amour du pays natal. Ils s’efforçaient surtout de produire une conscience municipale (ou, selon les cas, paroissiale), fondée sur une meilleure connaissance, par les habitants, de leur petite patrie, en particulier de son histoire, décrite avec un grand luxe de détail. Cependant, cette histoire du village était toujours indexée sur celle de la grande patrie, dont elle n’était qu’un résumé : l’intention de tout érudit était aussi d’apprendre aux habitants des campagnes, et d’abord aux plus jeunes, à connaître et à aimer la France en s’attachant à l’une de ses plus petites subdivisions. 

Il est peu probable que cette offensive localiste ait eu le moindre effet sur le rythme et l’ampleur de l’exode rural. Il n’est même pas certain que les écrits et l’enseignement des érudits locaux aient beaucoup contribué à enrichir la mémoire sociale des villages. Mais peut-être ces discours ont-ils malgré tout fini par façonner la perception que les ruraux se faisaient de leur identité de Français. D’ailleurs, les monuments aux morts de la Première Guerre mondiale allaient consacrer, et graver dans la pierre, ce principe de la double appartenance des citoyens à la petite et à la grande patrie.

Citer cet article

François Ploux , « Petites patries et grande patrie dans les campagnes françaises (xixe siècle) », Encyclopédie d'histoire numérique de l'Europe [en ligne], ISSN 2677-6588, mis en ligne le 21/01/25 , consulté le 19/02/2025. Permalien : https://ehne.fr/fr/node/22508

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Bibliographie

Bozon, Michel, Les conscrits, Paris, Berger-Levrault, 1981.

Fabre, Daniel, « Une culture paysanne », in Burguière, André, Revel, Jacques (dir.), Histoire de la France, vol. 4. Les Formes de la culture, Paris, Éditions du Seuil, 1993, p. 121-216.

Ploux, François, Une mémoire de papier. Les historiens de village et le culte des petites patries rurales (1830-1930), Rennes, PUR, 2011.

Thiesse, Anne-Marie, Ils apprenaient la France, l’exaltation des régions dans le discours patriotique, Paris, Editions de la Maison des Sciences de l’homme, 1997.

Weber, Eugen, La fin des terroirs. La modernisation de la France rural. 1870-1914, Paris, Fayard, 1983.

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