La Fédération Française d’Éducation Physique et de Gymnastique Volontaire (FFEPGV) organise pour la première fois en France à Lyon, en 1997, puis à Paris en 2002, les 2ème et 7ème éditions des Jeux Européens Sport-Santé (JESS). Fondée en 1888 pour lutter contre les effets de ce qu’elle définissait comme la dégénérescence de la population française, cette institution entend ainsi lutter un siècle plus tard contre la sédentarité et promouvoir le Sport-Santé dans l’Hexagone. En d’autres termes, les JESS cherchent à accentuer au tournant du xxie siècle la diffusion d’une pratique corporelle adaptée à tous les publics. Il s’agit en effet d’encourager l’accès du plus grand nombre aux activités physiques et sportives, ainsi que d’ouvrir des perspectives de progrès en termes de capacités physiques et de santé.
Promouvoir le Sport-Santé et la lutte contre la sédentarité
Depuis 1993 et l’élection d’un nouveau président, Gérard Auneau, la FFEPGV multiplie les initiatives sous la bannière « Sport-Santé ». Si la santé est depuis la fin du xixe siècle au cœur de l’identité culturelle de cette fédération, l’objectif est désormais de favoriser, dans tous les milieux sociaux et à toutes les périodes de la vie, l’épanouissement des individus par une pratique d’activités physiques régulière et dénuée de tout esprit de compétition ou de performances. S’inscrivant dans une véritable politique préventive, il s’agit aussi, conformément au principe d’une fédération sportive affinitaire, de favoriser les rencontres entre personnes aux préoccupations communes.
Pour ce faire, la FFEPGV met sur pied une politique de communication, interne et externe, avec l’aide de spécialistes en communication et marketing. Malgré quelques opposants, ce choix s’inscrit en continuité de la loi française du 16 juillet 1984 sur « l’organisation et le développement du sport » qui professionnalise les métiers du sport et oblige les fédérations à devenir des entreprises gestionnaires. Le slogan Sport-Santé incarne cette nouvelle stratégie désormais explicite dans les Plans d’Action à Moyen Terme. La fédération devient une « entreprise associative »" dont les techniciens (les animateurs) sont au service des adhérents (les gymnastes volontaires). Ce nouvel axe identitaire porte ses fruits : la barre des 400 000 adhérents est franchie en 1996 et celle du demi-million en 2002. Dans ce contexte, les initiatives se multiplient. Lors du congrès national de 1995 est créée une Confédération Européenne Sport-Santé. La décision est alors prise d’organiser à Lyon les premiers JESS en France pour diffuser dans le pays l’idée d’une éducation physique pour tous.
Cette initiative prolonge des campagnes initiées dès les années 1970 par le ministère français des sports et des instances européennes. Les JESS s’inscrivent notamment en continuité du projet Eurofit conçu en 1978 par le Comité pour le développement du sport du Conseil de l’Europe. Ce projet avait pour but de mettre en place le principe du sport pour tous afin d’améliorer par la pratique d'une activité physique le bien-être et la santé d’abord chez les enfants, puis au cours des années 1980, chez les adultes puis chez les séniors.
Médiatiser une conception alternative du sport de compétition
Organisée en France pour la première fois à Lyon, du 19 au 22 juin 1997, l’édition lyonnaise des JESS suit celle de 1996 à Barcelone qui correspondait au premier festival européen du Sport pour Tous. Ces seconds JESS de l’histoire du sport santé sont couverts par les chaînes de télévision française, notamment TF1, première chaîne privée, ainsi que France 2 et France 3 (au niveau national et régional) pour les chaînes publiques. Par leur intermédiaire, la FFEPGV cherche à convaincre l’opinion publique et les responsables politiques français qu’il est possible d’adapter la pratique des sports à tous les pratiquants, et plus particulièrement aux non-spécialistes. Il s’agit alors de défendre le droit de savourer le plaisir de l’action sportive dans la santé. Concrètement, les jeux durent quatre jours et combinent des activités de plein air (randonnées pédestres, parcours d’orientation, parcours de santé, activités nautiques sur le lac de Miribel Jonage, tir à l’arc, escalade, golf, roller et skate, VTT, frisbee, boomerang, cerf-volant), des sports collectifs (basket-ball, volley-ball, baseball et festi-foot), des sports en salle (multiples formes de gymnastiques, stretching, fitness, danses, tennis de table), mais aussi des sports aquatiques, une initiation au patin sur glace, ainsi que des sports de combat. En parallèle de ces activités, de nombreuses conférences sont proposées par des professeurs de médecine des différents hôpitaux de Lyon. Enfin, la FFEPGV a spécialement élaboré une batterie de tests qu’elle propose aux participants leur permettant ainsi d’évaluer leur niveau de forme et de leurs capacités physiques.
Cinq ans plus tard, la seconde édition française des JESS est organisée à Paris et en Ile-de-France, du 27 au 30 juin 2002. Elle mobilise plus de 1000 bénévoles et accueillent six fois plus de participants qu’à Lyon, avec 30 000 personnes dont 11 000 assistent à la cérémonie d’ouverture qui a lieu dans l’emblématique Palais Omnisports de Paris Bercy. Là encore, il s’agit de prouver pendant trois jours que les pratiques physiques et de loisirs, dans le cadre d’une activité non-compétitive, sont bien accessibles à tous les publics, et ce, sans préparation particulière, dans un esprit de découverte allié à une approche ludique. Les JESS offrent l’opportunité de promouvoir le triptyque « Plaisir – Progrès – Mouvement » avec l’épanouissement de chacun dans le respect des autres, et de porter le message selon lequel les pratiquantes et pratiquants peuvent toujours mieux utiliser leurs ressources en vue de se perfectionner, tout en respectant leur intégrité physique et morale par un engagement maîtrisé. Enfin, ces JESS réaffirment les nombreux avantages de mixer les âges, les sexes, les niveaux et les socioculturelles. Ils consacrent l’institutionnalisation en France d’un sport populaire, non compétitif, ludique, rationnel et hygiénique. Au 31 juillet 2002, la FFEPGV compte 521 672 adhérents répartis en 7547 sections et fait partie des quatre grandes fédérations de plus d’un demi-million de licenciés après le football, le tennis, et le judo. Ces deux éditions des JESS permettent aussi de diffuser en France le programme Health Enhancing Physical Activity (HEPA) promu par le Conseil de l’Europe et dont l’objectif principal vise, d’une part, à assurer la pratique d’une activité physique sans risque, et, d’autre part, de contribuer au bien-être et à la santé du plus grand nombre. Ce programme européen réunit alors des associations sportives finlandaises, néerlandaises, suisses, anglaises et françaises qui œuvrent au quotidien à la promotion des bienfaits de l’activité physique et sportive en direction des populations sédentaires ou peu actives, et plus particulièrement les jeunes, les adultes et les personnes de plus de 50 ans en difficulté sociale et/ou professionnelle.
Malgré le succès des deux éditions françaises des JESS, ces derniers disparaissent du paysage européen pour laisser la place à des programmes d’activité physique promus soit par le Conseil de l’Europe, soit par la Commission européenne. En effet, si de tels évènements n’existent plus depuis deux décennies, leur philosophie demeure à travers l’activité régulière du groupe d’experts du Conseil de l’Europe chargé de mettre en œuvre les lignes directrices du programme sur l’activité physique bienfaisante pour la santé (HEPA).
Lebecq, Pierre-Alban, Sport, éducation physique et mouvements affinitaires au xxe siècle, Paris, L’Harmattan, 2004.
Lebecq, Pierre-Alban, Morales, Yves, Saint-Martin, Jean, Travaillot, Yves, L’exercice et la santé : identité de la Gymnastique Volontaire en France (1954-2014), Lille, Le Manuscrit, 2013.
Miège, Colin, Les organisations sportives et l'Europe, Paris, INSEP-Éditions, 2009.